10 ans 10 histoires (2)

Pour les dix années d’existence de la SBA, nous vous proposons de revenir sur des événements marquants du passé avec les témoignagnes de ceux qui ont fait vivre l’association tout au long de son existence.

John O’Connell a gagné son voyage avec Serge au sein des centres de la SBA. Il nous raconte son périple

 

« C’est en levant la main à une vente aux enchères à un dîner rugby que tout a commencé, alimenté par la bonhomie, et peut-être un peu d’alcool aussi – action qui comporte toujours des risques – ce que j’ai appris à mes dépens (combien d’autres maillots de rugby vais-je accrocher sur mes murs à la maison pour l’amour de Dieu!)

Ç’aurait pu être la saveur gallique de la soirée, ajoutant du « chic français » à l’atmosphère, mais quoi qu’il en soit,  un simple geste de la main nous a parachutés avec mon frère Alan « l’arrangeur de crime » ; mon cousin irlandais Charlie ainsi que mon ancien camarade directeur des London WASPS, Graham Wynde. Quelques mois plus tard, nous nous retrouvions dans le « voyage Serge Betsen » au cœur du monde merveilleux du Cameroun pour être témoin de la mission première de la SERGE BETSEN ACADEMY : transformer les vies des jeunes là-bas par les valeurs du rugby.

Le Cameroun est constitué d’une population respectueuse des lois de la société mais qui montre malheureusement une disparité chronique dans l’infrastructure pour la santé, l’enseignement, le transport, l’énergie, l’eau et d’autres questions quotidiennes que nous prenons pour acquis en Occident.
Yaoundé, la capitale, est la face la plus reconnaissable du Cameroun aux yeux des occidentaux, mais même là-bas, à l’arrivée à l’aéroport chaotique, on était immédiatement conscients de la fragilité des réseaux routiers, de santé, hydraulique et énergiques. Serge, ayant évidemment ignoré tous les conseils de santé que son équipe nous avait prodigués à nous autres « puceaux de l’Afrique », s’est bêtement piqué avec une aiguille à l’aéroport qui semblait avoir déjà été utilisée, sans arrêt, sur beaucoup d’autres personnes auparavant.

Serge étant… Serge, il ne semblait même pas s’être aperçu que son bras avait été agressé, ralentissant drastiquement son rythme de marche lors de l’injection, coupant à travers la marée de porteurs enthousiastes comme Moïse en d’autres temps.

Le court séjour à notre hôtel a duré presqu’autant de temps que le vol, mais notre intacte naïveté nous a fait embarquer le lendemain au cœur du pays pour voir à l’œuvre la SBA à l’école et sur ​​les terrains de rugby.

Mon frère Alan a clairement été élevé à la même école que Serge, ignorant toutes les directives d’avant-voyage, nous obligeant à agir comme « Lord Bountiful » lors de la première école visitée, en distribuant des maillots des Queens Park Rangers – immédiatement transformés en une cérémonie des Awards par l’entreprenant professeur principal, ne sachant pas que la plupart des adeptes de football en Angleterre considéreraient ces maillots de QPR bien plus utiles pour laver les voitures (Désolé Alan) ! Serge, de son côté, a gracieusement écopé de deux cartons jaunes en distribuant des cadeaux et commettant le sacrilège d’offrir des maillots de foot dans une tournée rugby, bien qu’après réflexion, la disparition ultérieure de mon frère avec une forte dose de saveurs de Yaoundé aurait pu être sa revanche après tout !

L’enthousiasme des jeunes était palpable d’une visite à l’autre et notre prochain arrêt avait pour objectif de voir Serge en action pour entraîner les jeunes sur un terrain de boue cuite, beaucoup n’ayant pas de chaussures, d’autres n’ayant pas de t-shirts et la plupart ne portant aucun des deux : ce fut l’un des moments forts du tour. Une fois de plus, mon frère a considéré approprié de puiser dans son expérience footballistique, cette fois dans l’arbitrage appliqué au rugby en tant qu’assistant de Serge. La plupart d’entre nous avons été très touchés par l’innocence des yeux grands ouverts des jeunes qui s’est retrouvée partout où nous sommes allés – écoles, entraînements de rugby, etc. Ça me rappelle un moment où Serge a grondé un brave jeune homme pour lui demander un maillot ce qui fit écho à l’estomac d’Olivier Twist (cf Olivier Mussat, un des membres de notre délégation, mari d’Odile) demandant plus de nourriture ! Quelle audace de demander absolument un maillot pour jouer !

La « maman » de Serge fut une charmante hôte pour quelques jours, bien que notre séjour dans « la Maison des insectes » pour une nuit soit à classer au même niveau qu’essayer d’aller aux toilettes à l’extérieur d’un igloo par -30 degrés !

Odile, qui avait depuis émergé comme la femme forte du voyage (en fait, la seule femme en réalité) dans son style à la Margaret Thatcher, avait réquisitionné quelques chambres d’hôtel pour nous après une minutieuse inspection militaire au préalable. Pensant que les chambres avaient besoin d’aération, ce qui était le cas, et son dégoût des insectes aimant la chaleur des chambres à coucher bien éclairées, ce qui fut également le cas, elle a ouvert les portes de toutes les chambres et allumé les lumières pendant au moins deux heures avant que nous ne nous installions.

Avec  tous les spécimens d’insectes que le Cameroun a confortablement installés dans chacune de nos chambres, notre équipe touristique a fait la seule chose raisonnable vu l’état des choses : vider l’alcool du bar en s’émerveillant sur la capacité d’un simple Gecko à manger son propre poids  en insectes, sautant d’une pièce à l’autre. Comme vous pouvez l’imaginer, cela nous a pris plusieurs heures pour arriver à nos fins, mais ça nous a au moins distraits pour la nuit à venir. Le fait que le réceptionniste dormait sur la table du bar a révélé pas mal de chose après réflexion.

Visitant le Roi du village, écoutant ses malheurs au sujet de la presse qui le cantonne à un rôle de de chef entouré par de femmes dépendantes (stop, ceci ressemble un peu trop à chez nous !) l’empêchant de sauter dans notre véhicule pour se rendre en Occident, essayant discrètement d’humidifier son cabanon en hutte de terre avec son urine sentant le vin de bambou : le moment était mémorable, comme l’était, avec le contraste le plus complet, le merveilleux déjeuner à l’Ambassade de France (la prochaine fois on devrait rester là-bas !).

En observant l’école que les enfants ont aidé à construire, sans livre ni chaise, aucune fenêtre, un tableau littéralement peint en noir par eux-mêmes et aucune toilettes, nous avions ressenti l’une des expériences les plus humiliantes pour nous autres mauviettes occidentales (je suis impliqué avec association caritative pour les jeunes en Irlande aussi et je regrettais que certains d’entre eux ne puissent pas avoir été témoin d’un tel manque de besoins basiques qui les auraient fait apprécier leur relative chance.)

Le retour à Yaoundé le long de « l’autoroute suicidaire » avec des trous dans la route de la taille d’Andorre, la nuit avec des camions de transport de bois allant à toute vitesse en sens inverse sans aucun feux allumés, conduit par des chauffeurs fous alimentés au RED BULL, rendant finalement relativement calme le M25 au Royaume-Uni !

Entre temps, nous avons passé quelques nuits calmes dans une charmante ville en bord de mer, lapant la tranquillité du lieu tout en profitant d’un BARBECUE sur la plage – hormis mon frère qui était atteint de la « Malédiction de Serge » et le cousin Charlie boitant à cause d’une chute avec l’excuse suivante : « l’eau étant imbuvable, je choisis l’alcool !

Durant le voyage, Olivier, le mari d’Odile, souriait avec bienveillance sur sa prise de pouvoir sur la tournée – ce que nous avons très heureusement accepté aussi – comme elle avait clairement plus de compétences organisationnelles que nous autres (particulièrement quand est venu la gestion des insectes), ce que ses prises de responsabilité ultérieures avec la SBA ont confirmé.

Tout semble si loin maintenant, bien que seulement trois années soient passées, mais les souvenirs de ce genre voyage durant une vie sont toujours très vifs. Je sais que mes compagnons ressentent la même chose et j’espère vraiment que notre participation a aidé un peu à soutenir le merveilleux travail fait par la SBA au Cameroun. Donc continuez comme ça Serge, Odile et le reste de l’équipe. Et merci pour tous ces souvenirs ! »